L'imprimante 3D : présentée par Cathy Lewis de Desktop Factory
Propos recueillis par Laurent Suply (lefigaro.fr).
INTERVIEW - Fini les documents et le papier. Bientôt, vous pourrez répliquer, chez vous, des objets. Cathy Lewis, PDG de Desktop Factory, dévoile son imprimante en trois dimensions. Découvrez cet étrange engin en vidéo.
A l'occasion du Forum Netxplorateurs, qui se tient deux jours durant au Sénat, Cathy Lewis, PDG de l'entreprise américaine Desktop Factory, est venue présenter sa Desktop Factory 125ci 3D Printer, qui fait partie des dix finalistes du «Grand Prix Netxplorateur 2008». Cette boîte de la taille d'un mini four est capable de créer des objets en trois dimensions à partir d'une pâte de nylon et d'un faisceau halogène concentré. Démonstration du processus en vidéo (images accélérées):
Lefigaro.fr: Votre entreprise lance sur le marché une imprimante 3D. Les gros industriels dans l'automobile ou le design en possèdent déjà. Quel est l'intérêt de votre «Desktop Factory 3D Printer» ?
Cathy Lewis: Nous voulons lancer la révolution de l'imprimante 3D personnelle. Les modèles industriels coûtent des centaines de milliers de dollars et ne sont pas forcément compatibles avec les réseaux informatiques ou même électriques. Certaines sont si imposantes qu'il faut les utiliser dans des locaux dédiés. Notre imprimante 3D coûte 4.995 dollars et mesure 60 sur 50 cm, ce qui la met à la portée des domiciles ou des bureaux de petites entreprises.
Personne, aujourd'hui, n'imprime au quotidien des objets en 3D. Qui a vraiment besoin d'un tel outil ?
De fait, nous prendrons peut-être quelques clients aux fabricants d'imprimantes 3D classiques. Mais nous voulons surtout créer un nouveau marché et apporter cette technologie aux petites entreprises telles que les cabinets de design indépendants, aux écoles qui devraient représenter 50% de notre marché dans les premières années, mais aussi aux particuliers.
Aux Etats-Unis, où il existe un véritable attrait pour le «Do It Yourself», l'imprimante 3D devrait séduire tous ces passionnés. De nombreux sites communautaires se développent autour des travaux pratiques, du bricolage.
Une imprimante 3D ne risque-t-elle pas de couper l'herbe sous le pied d'autres industries, par exemple les fabricants de jouets ou de maquettes ?
Je ne le crois pas. D'abord parce que notre appareil est pour l'heure incapable de reproduire une copie exacte d'une figurine finement sculptée. L'utilisateur peut en faire une réplique crédible et représentative, mais pas aussi bonne que l'original. Au contraire, nous adorerions travailler avec les fabricants de jouets. Imaginons que je perde une pièce d'un jeu de plateau. Au lieu de racheter une boîte, qu'il faudra fabriquer en Chine, transporter jusque dans mon pays, et livrer chez moi, je pourrais aller sur le site du fabricant, télécharger à moindre coût le design 3D de la pièce, et l'imprimer chez moi. J'adorerais aussi permettre aux enfants de télécharger un kit de design «Dora l'exploratrice», par exemple. Plus globalement, l'imprimerie 3D à bas coût risque de bouleverser la chaîne de production des biens manufacturés. Nous voulons convaincre les industriels qu'il y a vraiment un nouveau modèle économique dont l'imprimante 3D sera le cœur.
Un phénomène amusant avec les passionnés de high-tech est leur tendance à détourner les appareils, à imaginer des usages auxquels les concepteurs n'avaient pas pensé…
Oui. La masse des utilisateurs va amener des applications que nous n'aurions jamais imaginées. Ils le font toujours. Un des grands chantiers sera de créer un catalogue des usages et des créations de nos clients, ainsi qu'une vraie communauté, probablement regroupée autour d'un site web. Sur internet, les gens aiment vraiment partager leurs connaissances, et nous devrons choyer nos «super-users» qui, au final, nous apporterons une meilleure connaissance de notre propre produit.
Vous nommez votre outil «imprimante 3D», mais le processus est bien différent du fait d'imprimer un document. Le terme convient-il ?
C'est un peu un choix par défaut. Nous avions pensé à des termes tels que «modelers, fabricators, replicators». Mais ces mots avaient des sens différents selon les audiences auxquelles nous les soumettions… Nous avons décidé de nous en tenir au terme consacré par les fabricants d'imprimantes 3D industrielles.
Mais dans les dix ans à venir, je suis persuadée que les utilisateurs vont eux-mêmes nous dire comment appeler ce nouveau produit et ces nouveaux usages. Qui peut savoir quel nom ils vont inventer ?
Quel succès rencontre ce premier modèle, et que prévoyez-vous pour le futur de l'imprimante 3D ?
Nous avons déjà 350 réservations pour le marché américain. Nous n'avons fait aucune publicité, mais nous avons déjà des demandes d'Italie, de France, de Grande-Bretagne, de Chine, d'Inde et même d'Afrique du Sud et de Nouvelle-Zélande. L'imprimante 3D devait arriver en Europe en 2009, mais face à cet engouement, nous allons essayer d'accélérer la cadence.
Pour la suite, notre priorité est de réduire encore le prix du produit, et de l'améliorer. En augmentant sa résolution, sa vitesse, en permettant d'imprimer avec d'autres matériaux que la pâte de nylon que nous utilisons et plus tard, en y ajoutant des couleurs.
Quand la technologie se met au service de l'imagination et la créativité ... Je pense que de nombreux professionnels verront l'intérêt de cette invention...