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Le blues du blogueur, mythe ou réalité ?

18 Janvier 2008 , Rédigé par Sandrine Publié dans #networkings

Neteco par Ariane Beky le Vendredi 18 Janvier 2008 

La fin de l'âge d'or ?

Plus de 110 millions de blogs, sites web personnels ou collectifs proposant des contenus affichés chronologiquement, contenus susceptibles d'être commentés par les internautes, sont indexés par Technorati, moteur de recherche spécialisé.

Toutefois, en 2007, la blogosphère est passée « de l'exubérance à l'équilibre avec quelque 30 millions de blogueurs actifs et une communauté d'environ 30 millions de contributeurs actifs à travers le monde », selon Gartner, institut d'études de marché.

Technorati constate également ce ralentissement de croissance de la blogosphère mondiale. Alors que le moteur évaluait les créations de blogs à 160.000 par jour en 2006, ce chiffre serait retombé à environ 121.000 par jour au premier trimestre 2007, pour environ 65.000 billets mis en ligne par heure.

Lassitude des blogueurs ? Concurrence des réseaux sociaux ?

Du geek au blogueur influent

Le premier blog aurait vu le jour aux Etats-Unis en juillet 1997 avec Robot Wisdom, toujours actif aujourd'hui. Cependant, pour voir se démocratiser le phénomène, il faudra attendre le développement d'outils gratuits ou payants de publication de contenus en ligne ne nécessitant pas forcément de connaissances techniques. Parmi ces plates-formes : Movable Type (Six Apart) et Drupal en 2001, Skyblog en 2002, Blogger (ex-Pyra), WordPress et Dotclear en 2003.

Société californienne, Technorati publie et met régulièrement à jour son top 100 « mondial » des blogs, autrement dit ceux qui génèrent le nombre de liens entrants le plus élevé. Ce classement, dominé par des sites collectifs devenus de véritables webzines financés par la publicité (Engadget, Gizmodo, Techcrunch), fait la part belle aux blogs anglophones.

Quoi qu'il en soit, nul besoin de faire partie de ce top 100 pour être considéré comme un blogueur « influent », courtisé par les agences de communication, cité par la presse traditionnelle. Selon Six Apart, éditeur américain des plates-formes de blogging Movable Type, TypePad et Vox, le blogueur influent dispose d'une communauté d'aficionados. Ces derniers commentent à plaisir les billets et autres interventions médiatiques du blogueur sur le site de l'intéressé, sur leurs propres sites, sur les forums de discussions, les réseaux sociaux et autres sites communautaires. Selon Technorati, environ 10.000 de ces blogs comptent chacun plus de 500 sites qui pointent vers eux (liens entrants).

Par ailleurs, le plus souvent, le blogueur influent monétise ses contenus par le biais de liens sponsorisés, parrainages et autres bannières publicitaires « au clic » voire « à l'impression », affiliation, commissions sur les ventes, etc.

Selon une étude réalisée en 2006 par l'Université du Texas (UTD) et l'agence Chikita 50.000 blogs à travers le monde auraient engrangé 500 millions de dollars de revenus publicitaires. Dans le détail : 1% des blogs concernés auraient engrangé 20% du revenu total, 5% du top environ 50%, 10% environ 80% et 15% environ 90%.

En France, l'écrasante majorité des deux millions de blogueurs « actifs » ne touche pas un centime. Cependant, plusieurs dizaines de milliers d'entre eux cherchent désormais à monétiser leur trafic.

Opérateur de la plate-forme publicitaire AdSense, Google ne fournit aucune donnée sur le nombre de comptes créés dans l'hexagone et sur les montants reversés. Zlio indique que certains de ses membres toucheraient jusqu'à 750 dollars par mois de commissions. Par ailleurs, Influence, « agent des blogs et des sites influents », régie du groupe Heaven, estime que plusieurs dizaines de blogueurs toucheraient désormais plus de 1000 euros hors taxe par mois, des revenus encaissés via des sociétés voire des associations et soumis aux charges sociales et impôts divers.

Cette « élite » des blogs est en majeure partie administrée par des pionniers de la blogosphère, entreprenautes, journalistes et communicants. Mais les pionniers sont fatigués.

Du blogueur influent au marchand

« Or, comment donc ce quidam est-il devenu un beau jour prescripteur ? En reprenant à son compte de manière publique, visible et ostensible, les codes, les usages, les us et coutumes de ce petit monde qui le coopte après avoir mesuré son degré de servilité, puis vérifié son utilité pour le bon fonctionnement à la machine marchande. Disons-le autrement : en adhérant au rituel, c'est-à-dire en s'esclaffant avec ceux du milieu qui s'esclaffent, en vitupérant avec le même entrain grégaire, en doutant avec les douteurs, en affirmant avec les affirmateurs déjà en place. »

Cette phrase extraite du livre de Michel Onfray « La puissance d'exister - Manifeste hédoniste » (Grasset - 2006) peut-elle s'appliquer au blogueur influent ?

Damien Guinet, 'évangeliste' au sein de l'agence conseil en marketing en ligne Heaven, estime que « ce n'est pas le blogueur qui est prescripteur, mais le passionné ». Il ajoute : « il s'avère que de nombreux blogs sont tenus par des passionnés. Des passionnés de mode, de high-tech, de séries... Il est logique que les marques souhaitent être reconnues comme interlocuteurs par cette frange de la population qui est massivement présente (et souvent très référencée) sur le web ».

Ce point de vue est partagé par Fanny Bouton, entreprenaute et blogueuse : « les plus influents sont souvent les premiers à être arrivés dans un réseau et ils n'ont pas hésité à donner de leur personne et de leur passion. C'est souvent ce qui a fait leur reconnaissance. La démarche était sincère. On voit d'ailleurs comment évoluent ceux qui se font trop acheter et ne sont plus objectifs dans leurs choix. ».

Pour Gilles Klein, journaliste et blogueur, responsable du quotidien LeMondeDuBlog.com, « le blogueur 'influent' n'est 'influent' que dans une partie de son petit cercle d'amis ou de visiteurs, on surestime souvent son impact. Faire du buzz via un réseau de blogueurs, via un groupe sélectionné, comme on le fait dans l'univers du lobby et des relations publiques, a une certaine efficacité. Blogueurs ou non blogueurs, non internautes habitués de tel ou tel groupe professionnel ou social, ne sont ni plus, ni moins 'serviles' ou 'utiles au bon fonctionnement de la machine marchande'. Les confréries professionnelles, les scuole vénitiennes étaient des lieux de pouvoir, de réseaux, d'influence, il y a quelques siècles. Rien de nouveau, simplement il y a de nouveaux types de réseaux »

Mais pour Tristan Nitot, entreprenaute et blogueur, « cette citation remarquable démontre le mécanisme qui a permis à une poignée d'individus de construire une audience très lucrative, à force de contenus racoleurs et de comportements visant à brosser le lectorat dans le sens du poil. Mais à partir du moment où ce n'est plus l'individu qui s'exprime, mais un personnage fabriqué en vue de créer de l'audience, ça n'est plus un blog, c'est de la télé-réalité avec régie intégrée ! C'est la principale raison qui me fait refuser la publicité sur mon blog : je redoute qu'elle induise sournoisement la course à l'audience qui me ferait perdre mon âme, par exemple en parlant de photos intimes de championnes olympiques ».

Du blog au réseau social

Le blog ne suffit plus à combler les besoins de communication et de mise en relation des internautes. Arrivés en force des Etats-Unis, les réseaux sociaux prennent la relève. D'après comScore, MySpace affichait 114 millions de visiteurs uniques en juin 2007, Facebook 52 millions, Hi5 28 millions, Friendster 24,6 millions, Orkut 24 millions et Bebo 18 millions.

Par le biais de ces plates-formes communautaires, l'internaute peut créer un profil, partager des contenus multimédias avec ses contacts, élargir son cercle de connaissances, échanger messages et fichiers, créer sa propre communauté thématique et... bloguer.

Quel blogueur influent n'a pas de profil sur Facebook ? Lancé par deux anciens étudiants d'Harvard en 2004, ouvert à tous les internautes depuis, Facebook affiche désormais 60 millions de membres actifs à travers le monde. En 2007, Microsoft et Li Ka-Shing, milliardaire chinois basé à Hong Kong, sont entrés dans le capital de la jeune pousse co-fondée et dirigée par Mark Zuckerberg, 23 ans. La société est valorisée près de 15 milliards de dollars.

Technorati, déjà malmené par la concurrence des moteurs généralistes (aux Etats-Unis, selon Hitwise, l'audience de Google Blog Search dépasse celle de Technorati), se réorganise dans l'espoir de devenir un média social et marketing - conversationnel - de référence. Son fondateur, Dave Sifry, a cèdé sa place de président (CEO) à Richard Jalichandra le 1er octobre 2007.

D'après Gilles Klein, « la montée en puissance des réseaux sociaux contribue au ralentissement de la croissance de la blogosphère tout en attirant de nouveaux internautes peu intéressés par les blogs. Toutes les petites applications ludiques proposées par Facebook séduisent même des gens 'sérieux'... Elles contribuent par les sollicitations envoyées automatiquement par email à tous vos 'amis' à vous maintenir dans l'univers Facebook. »

Tristan Nitot déclare, pour sa part, « on pourrait certes croire que Facebook pourrait remplacer les blogs, ou être une évolution de ceux-ci. A l'inverse, on voit des outils comme Plaxo Pulse qui reprennent le contenu des blogs en le syndiquant. Un nouvel équilibre va se trouver, je pense, mais il reste à inventer. Et puis il faut bien voir que le blog traditionnel est un outil qui favorise les 'littéraires', ou du moins ceux qui ont un rapport facile avec l'écrit. Avec l'apparition de blogs photos ou de blogs vidéos, on s'ouvre à d'autres formes d'écriture au sens large du terme. De même, des outils comme Twitter ou Bloggino.com permettent de bloguer dans un format plus court, depuis autre chose qu'un ordinateur : téléphone mobile, smartphone, etc. »

« Les réseaux sociaux font indiscutablement partie des outils des blogueurs », ajoute Damien Guinet. Il poursuit : «une population aussi connectée que la blogosphère qui s'évalue au travers de son audience, du nombre de commentaires par billet et du nombre de liens pointant vers son blog, a définitivement besoin de démultiplier ses points de présence online ».

Alors, bloguer a-t-il toujours du sens ?

Oui, si l'on en croit Fanny Bouton. « Même si à certaine période je lève le pied, c'est un lien avec les habitués de la soirée (des geeks mobiles tous les 2 mois à Paris ou Fanny's Party ) et une trace mémoire personnelle », déclare-t-elle.

Ce sentiment est partagé par Damien Guinet : « oui, définitivement, bloguer a toujours du sens. Mais cet exercice a naturellement évolué. Les blogs les plus traditionnels suivent leur voie, sans trop chercher à attirer l'attention sur eux et persistent à produire un contenu à une audience qui s'élargit. D'autres contredisent ce que Dan Gilmore redoutait dans son 'We the Media', en se professionnalisant. »

Quoi qu'il en soit, conclut Tristan Nitot, « il y a un blues du blogueur, car il y a une usure avec le temps. Mais il y a aussi des périodes de rémission, où le plaisir de bloguer à nouveau revient. »
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G
Merci pour ce billet très intéressant.En effet, pour moi, bloguer, c'est une recherche de plaisir que l'on peut avoir à échanger avec les autres, mais aussi à structurer ses idées.Vouloir gagner de l'argent avec son blog.....c'est le meilleur moyen de perdre le plaisir et l'envie et même si l'on passe beaucoup de temps à bloguer, autant rester sans pub !
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